Prophéties chrétiennes et historionomie : une rencontre amusante (ou pas)
Dans mon dernier billet, je me suis amusé un peu en spéculant, probablement de manière excessive, sur les implications de l'annonce de la NASA quant à une éventuelle reprise de la conquête spatiale.
Après cette première pause intellectuelle consacrée, donc, à la science-fiction, j'ai envie de m'en offrir une seconde, avant de reprendre les analyses plus "sérieuses", en donnant, une fois n'est pas coutume, dans le mystique.
Et je vais faire cela en confrontant quelques prophéties avec mes prévisions historionomiques plus sérieuses.
Les oiseaux du Pape François
Commençons par cet événement assez surprenant, il y a presque deux ans : en janvier 2014, au tout début de la crise ukrainienne, mais alors que la situation commençait à dégénérer, le Pape priait pour la paix en Ukraine, et fit lâcher par des enfants deux colombes, symboles de la paix.
A la stupeur générale, les deux pauvres volatiles furent aussitôt attaqués par un corbeau et une mouette. Elles finirent par s'en sortir bien vivantes, mais après avoir morflé, tout de même.
Bien sûr, nombreux virent cela comme un mauvais présage. Moi le premier, sans doute comme tous ceux qui ont quelque habitude de fréquenter les auteurs Anciens : à Rome, les augures observaient les oiseaux et prenaient les auspices (de aves, "l'oiseau", et spicio, "je regarde" ; l'autre moyen de divination rituelle était de lire les entrailles des bêtes, ce que l'on appelait haruspices de haru, les entrailes, et du même spicio).
Mais un présage, en art divinatoire, cela doit s'interpréter. Et là, avec un corbeau et une mouette attaquant deux colombes, cela sentait l'auspice sensé.
Alors, quel sens ?
Ma foi, pour moi qui donnais il y a deux jours un billet évoquant le bras de fer en cours et à venir entre la thalassocratie américaine et les ambitions tellurocratiques russes, l'interprétation semble toute trouvée : les deux colombes, représentant soit l'Ukraine, soit l'Europe entière, attaquées et déchirées par deux oiseaux représentant l'un la mer (la mouette, pour ceux qui ne suivent pas) et l'autre la terre (le corbeau, donc), c'est-à-dire l'Amérique et la Russie.
Au moment où le Pape priait pour la paix en Ukraine, cela sonnait donc comme un divin NIET.
La question d'inteprétation est : les deux colombes représentaient-elles l'Ukraine seule, ou toute l'Europe ?
Parce que si c'est l'Ukraine seule, alors la prophétie (partons du principe que c'en est une, sinon ce billet n'est pas ludique) est déjà réalisée : l'Ukraine a connu de grandes épreuves, a été déchirée entre est et ouest mais, comme les deux colombes, est toujours bien vivante et panse ses plaies.
L'Amérique et la Russie se disputant l'Europe. Cette prophétie vous est offerte (malgré lui) par le Pape François.
Mais, comme je ne cesse de le dire depuis un moment, les choses vont vraisemblablement empirer en Europe pour conduire à une guerre civile générale entre atlantistes et prorusses, chaque camp étant soutenu par sa puissance tutélaire.
Et dans ce cas, c'est que ces deux colombes becquetée par le corbeau et la mouette sont une prophétie sur l'avenir de l'Europe. Pour le coup cela collerait avec mes prévisions. Et en toute logique, il semble qu'il faut au moins une situation aussi grave pour que nous ayons eu droit à une prophétie du Pape (même involontaire), place Saint Pierre, et tout et tout.
La liste de Malachie
Je pense que tous mes lecteurs connaissent bien la prophétie de Malachie, tant il est vrai qu'on la ressort à chaque conclave. Pour ceux qui en veulent le résumé, l'article de Wikipedia fait ça très bien.
Alors oui, je sais, l'Eglise catholique n'a jamais reconnu de validité à cette prophétie. Mais il faut dire qu'elle est souvent tombée étonnament juste et, surtout, que là encore, si on ne considère pas que c'est une vraie prophétie, ce n'est pas drôle.
Or donc, selon cette prophétie, le Pape François serait le dernier, dénommé "Petrus Romanus", que l'on traduit usuellement par "Pierre le Romain". Des gens se sont déjà amusés à noter des coïncidences. Ainsi, le pontificat de son prédécesseur, Benoît XVI, a officiellement pris fin le 28 février 2013, soit la saint Romain. En outre, le Pape François a été élu le 13 mars 2013, or le 13 mars on fête Pierre II de la Cava ; quand on sait qu'aucun pape ne s'est appelé Pierre à part Saint Pierre, ce Pierre II est amusant.
Cela conduit certains catholiques à interpréter avec effroi le pontificat de François comme le dernier avant l'Apocalypse. Gloups.
Mais comme moi, je n'interprète jamais rien comme tout le monde, j'ai envie de proposer mon point de vue original (j'ai le droit, c'est mon blog).
Le fait est que cette traduction unanime de "Petrus Romanus" en "Pierre le Romain" ne s'impose nullement en français. En notre belle langue de Molière, cela peut aussi bien, et même mieux, se traduire par "le Pierre romain". C'est-à-dire le Pierre résidant à Rome.
Je suis Jean-Baptise Poquelin, et j'approuve cette traduction !
Suivant cette inteprétation, le Pape François ne serait donc pas le dernier pape tout court, mais juste le dernier pape résidant à Rome. Après il pourrait déménager, ou simplement devenir nomade, comme l'était saint Pierre. Ce qui collerait d'ailleurs assez avec ce que je décris dans mon livre comme étant l'avenir probable du christianisme.
Inutile donc de lancer une panique maya-style.
A ceci près que, si cette interprétation nous permet d'éviter une fin du monde (vous n'avez pas envie de me remercier ?) cela pose tout de même la question du "Mais pourquoi donc ?". En effet, avec un siège aussi bien situé, dans une ville fort agréable et touristique et des bâtiments prestigieux, pourquoi le pape voudrait-il s'en aller ?
Et c'est là qu'on retombe sur le cadre général de mes prévisions historionomiques : la grande guerre générale et spécifiquement en Europe. Pas la fin du monde, donc, mais une fin d'un monde. Pas l'Apocalypse mais assez apocayptique. Et dans ce cadre-là, il se pourrait bien que Rome soit dévastée et devienne inhabitable.
Et cela évoque une troisième prophétie, le fameux troisième secret de Fatima. Extrait choisi : "un Évêque vêtu de Blanc, nous avons eu le pressentiment que c'était le Saint-Père. (Nous vîmes) divers autres évêques, prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée, au sommet de laquelle il y avait une grande Croix en troncs bruts, comme s'ils étaient en chêne-liège avec leur écorce ; avant d'y arriver, le Saint-Père traversa une grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d'un pas vacillant, affligé de souffrance et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu'il trouvait sur son chemin ; parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux au pied de la grande Croix, il fut tué par un groupe de soldats qui tirèrent plusieurs coups avec une arme à feu et des flèches ; et de la même manière moururent les uns après les autres les évêques, les prêtres, les religieux et religieuses et divers laïcs, hommes et femmes de classes et de catégories sociales différentes."
L'Eglise catholique, toujours soucieuse de ne pas terrifier les gens, a interprété cela comme s'étant réalisé dans l'attentat perpétré contre Jean-Paul II.
Mais en fait, il faut le dire, cela collerait plus tant avec mes prévisions historionomiques qu'avec les oiseaux du Pape François et la liste de Malachie que Rome soit dévastée et que le Pape y soit tué. C'était peut-être d'ailleurs plutôt à François que s'adressait le message des oiseaux. Je me demande si cela lui a traversé l'esprit.
Dans mon dernier livre j'explique (sans donner dans le mystique, pour le coup, mais uniquement dans l'histoire théorique et l'anthropologie religieuse) pourquoi je pense que le catholicisme est à l'aube d'une renaissance mondiale, des conditions institutionnelles internes comme externes, politiques, et spirituelles de son essor initial se remettant progressivement en place, après un cycle long dans lequel l'on a déjà vu se reproduire, sous une forme nouvelle, l'histoire grecque dans celle de l'Europe, l'histoire romaine dans celle de l'Amérique, et l'histoire judaïque dans celle de l'islam. Le fait que cela passe, en outre, par un martyre initial semblerait plutôt logique ; et puisqu'il ne peut pas y avoir de deuxième Christ, cela semble devoir être le sort de son vicaire.
La Papauté fourdoyée - Le soir du 11 février 2013, jour de la démission du Pape, un terrible orage éclatait à Rome. Autre sombre présage : la foudre s'abattait sur Saint Pierre. J'étais non loin, ce jour-là, participant à un séminaire de l'Ecole française de Rome. Un signe de ce que le pontificat suivant serait, lui aussi, frappé par le feu du ciel ?
Finalement, les prophéties et présages chrétiens, c'est un peu comme le train fantôme : on y entre pour s'amuser, mais une fois dedans on a toujours un peu les jetons.