Certes, le titre de ce billet pourra paraître racoleur, mais je n'écrirais pas cela si je ne le pensais pas.
Il ne s'agit pas pour moi, aujourd'hui, d'aborder un sujet nouveau, mais plutôt de synthétiser plusieurs problématiques abordées dans de précédents billets, après un an d'activité sur ce blog et qui, prises ensemble, dessinent un réseau de conflits de grande ampleur, tous liés les uns aux autres mais pouvant aussi être abordé séparément.
Il n'est donc pas question d'envisager un conflit de nature inédite, quelque chose de radicalement nouveau qui devrait terrifier. Simplement il me semble que la guerre à venir, et qui s'approche rapidement, sera en réalité une somme de guerres, de différents types et de différents motifs, qui se tiendront toutes en même temps. C'est cette simultanéité qui donnera au conflit à venir de mériter ce qualificatif de "plus grande guerre de tous les temps", par effet cumulatif : non seulement les conflits auront lieu en même temps mais, pour une grande part, ils s'accentueront mutuellement, entreront en résonnance les uns avec les autres.
La guerre dans le monde arabo-musulman
Bien sûr, il faut commencer par le monde arabo-musulman, dans lequel la situation ne risque guère de s'arranger : c'est, me semble-t-il, un rêve que de croire que l'Amérique pourrait accepter de changer son fusil d'épaule et soutenir Assad contre Daech.
En effet, j'ai déjà expliqué, il y a quelques mois, que depuis 2008 l'adversaire stratégique prioritaire pour l'Amérique est la Russie, et que toute la politique étrangère apparemment erratique et/ou islamophile d'Obama avait ce curieux point commun d'affaiblir les positions russes traditionnelles : ouverture de Cuba, allié précieux de l'URSS, et destruction de Khadafi pour la même raison ; apaisement avec l'Iran afin de le désarrimer d' l'axe russo-chinois et de planter un coin dans le bloc continental ; et enfin renversement recherché de Bachar Al Assad, pour finir d'expulser la Russie de l'Orient et infliger une claque à Poutine en lui volant son précieux port de Tartous - ou l'épuiser en le contraignant à déployer des forces pour le défendre.
Toute intervention massive des Etats-Unis contre l'Etat islamique est donc un rêve car contraire avec la priorité américaine. C'est bien pour cela que les Etats-Unis ont principalement bombardé l'Etat islamique en Irak, parce qu'il fallait faire plaisir à l'Iran et protéger le régime "ami" de Bagdad, mais en Syrie ils ont essentiellement défendu Kobané et la frontière turque, parce que la Turquie est dans l'OTAN.
Les Etats-Unis ne s'engageront donc véritablement dans une guerre d'anéantissement contre Daech que lorsque Bachar al-Assad sera tombé et que Poutine aura perdu un allié précieux au Proche-Orient, et son dernier port de Méditerranée. Ce qui signifie que l'afflux des immigrants en Europe continuera, ce qui aura des conséquences sur la stabilité politique européenne et exercera sur la structure de l'Union de nouvelles contraintes, alors que l'affaire grecque risque de connaître de nouveaux rebondissements douloureux après les élections du 20 septembre.
Notons, par ailleurs, que d'autres problèmes pourraient se surajouter : en Algérie, la mort probable de Bouteflika dans la décennie qui vient pourrait bien être le signal d'un retour de la guerre civile qui fut déjà si terrible.
La guerre en Europe
Je ne détaillerai pas plus que je ne l'ai déjà fait les ressorts d'une guerre en Europe, consécutivement à l'éclatement à venir de l'Union Européenne et les ambitions russes sur le continent. Je soulignerai simplement que ce conflit sera vraisemblablement concommitant à l'embrasement sous forme de guerre civile de plusieurs nations européennes dans lesquelles le regain de difficultés économiques, la nouvelle vague d'immigration et l'accroissement de la menace terroriste, provoqueront des soulèvements tendant au nettoyage ethnique, soulèvements profitant souvent aux partis populistes qui trouvent déjà un fort appui dans le Kremlin, et favoriseront à leur tour l'expansion du poutinisme en Europe. Il est vraisemblable que la France et l'Allemagne seront les plus touchées. Au total, les ambitions russes tout comme le résultat de politiques absurdes combinant immigrationisme et Etat-providence durant des décennies en Europe conduiront à un embrasement du continent tout à fait comparable à ce qui le frappa durant la Seconde guerre mondiale. Le fait que plusieurs pays pourraient tomber partiellement ou intégralement sous l'influence de la Russie Poutinienne, notamment la France, bien sûr, pourrait bien effrayer les Etats-Unis. En effet, il faut constater que leur politique, très efficace, pour diminuer l'influence russe au Moyen-Orient, produit un effet inverse en Europe en renforçant le parti poutiniste, ce qui à terme risque d'avoir des conséquences difficiles à gérer pour les Etats-Unis. Il est fort probable, en cas de soulèvements de masse en Europe, que la fracture interne, la guerre civile dans plusieurs pays, exige l'envoi de troupes américaines dans le cadre d'une sorte d'opération de maintien de l'ordre intra-OTAN. En somme, la guerre hybride chère à Poutine, mais étendue à une grande partie de l'Europe, avec l'espoir pour Poutine de gagner l'Europe, pour les Etats-Unis de la conserver dans leur alliance.
Le moment du déclenchement du conflit en Europe sera pratiquement concomitant avec celui en Asie ; j'ai déjà donné, pour cela, la date approximative de 2018-2019.
La guerre en Asie
En Asie, la Chine de Xi Jinping est prête à tout pour réaliser son rêve hégémonique, et ce d'autant plus qu'il paraît sur le point de lui échapper.
Dans mon billet du 27 juillet dernier, je notais à ce propos "en novembre il doit être décidé si le FMI accorde ou non au renminbi, la monnaie chinoise, le statut de devise de réserves à intégrer aux Droits de Tirage Spéciaux, ce qui serait une reconnaissance institutionnelle de la valeur de cette monnaie. Le gouvernement chinois lui-même fait de cet objectif un point d'honneur, une étape de prestige dans l'émergence chinoise comme superpuissance mondiale. Or, le FMI, qui a déjà refusé d'accorder ce statut en 2010, pourrait être à nouveau récalcitrant si la Chine passe les trois mois précédents sa décision à bidouiller ses marchés boursiers et à tripatouiller sa monnaie. Cela fait mauvais effet, et l'on peut parier que ceux qui n'ont aucun intérêt à voir le yuan paré d'une telle reconnaissance institutionnelle, c'est-à-dire les Etats-Unis soucieux de protéger l'hégémonie du dollar, pilier de leur politique internationale, sauront faire mousser cet argument au FMI."
Or j'ai appris, avec un peu de retard et grâce à un passionnant article synthétique sur la situation de la Chine de mon ami Michel Leter, que le 20 août dernier, le FMI a effectivement fait une annonce humiliante pour la Chine en informant que la composition des DTS ne serait pas modifiée avant septembre 2016, quelle que serait la décision prise au mois de novembre.
Il semble donc que le levier de pression du FMI ait bien été tiré aux USA, et que là était la raison véritable de la dévaluation chinoise, comme le note Michel Leter, ainsi que du nouveau décrochage boursier intervenu entretemps.
Cela est de nature à accentuer les difficultés de l'économie chinoise, qui ne pourra pas bénéficier du statut avantageux qu'elle espérait pour sa monnaie. Pour cela, comme pour le reste, le rêve chinois semble s'évanouir quand les dirigeants de l'Empire du Milieu se croyaient sur le point de le saisir enfin. Il faut donc s'attendre à voir encore la bourse cahoter, au fur et à mesure que se révélera, malgré les manipulations, le véritable état de l'économie chinoise. Avec ces difficultés, le régime communiste chinois se trouvera vite devant une alternative redoutable : lâcher prise et procéder à une perestroïka, ou au contraire lancer le pays dans une aventure extérieure pour regagner sa légitimité. Et il est évident que Xi Jinping n'a pas l'intention d'être le Gorbatchev chinois.
Certes, il n'est sans doute pas assez fou pour lancer son pays dans une guerre totale que la Chine serait sûre de perdre, opposée qu'elle se trouverait à tous ses voisins, auxquels s'ajouteront les Etats-Unis. Mais il pourrait tenter des opérations limitées, juste assez pour resserrer les rangs derrière une unanimité nationaliste. Toutefois, dans la situation de fébrilité consécutive au regain de crise économique mondiale, cela dégénérerait très facilement en pugilat panasiatique, spécialement si l'Amérique est déjà aux prises, en Europe, avec la Russie. Naturellement, un conflit dans cette région si dynamique du globe aggraverait encore un peu plus la situation économique mondiale.
Les troubles en Amérique du Sud
Tous ces différents conflits ne feront qu'aggraver dramatiquement une situation économique déjà terrible, et les pays émergents en feront les frais. Déjà le Brésil, pays prompt aux émeutes, connaît des difficultés. Lorsque le monde se sera embrasé, il est à craindre que le pays connaisse des troubles sociaux et politiques très importants.
Ce sera aussi, vraisemblablement, le cas du Venezuela, déjà au bord de l'implosion, et de l'Argentine, pays fragile.
Au total, la situation générale en Amérique du Sud sera vraisemblablement moins grave qu'ailleurs, mais elle ne sortira pas indemne de cette phase de secousses à l'échelle globale.
Sans doute, au cours de la décennie qui nous attend, nombreux seront ceux qui auront le sentiment d'assister à la fin du monde. L'on verra se multiplier les prêcheurs d'apocalypse, et surtout la fébrilité gagnera les individus, ce qui facilitera l'émergence de troubles.
Mais cela ne sera pas la fin. Cette somme de conflits débouchera sur un vrai monde unipolaire, dominé plus fortement que jamais par les Etats-Unis.
L'issue
En Europe, la Russie sera vaincue. Les dégâts seront d'autant plus grands que le poutinisme aura eu du succès, et le bilan humain pourrait être terrible, notamment parmi les populations d'origine immigrée durant ces quarante dernières années. Poutine tombera, et il est vraisemblable que l'Amérique découpera le territoire russe en morceaux, comme Rome l'avait fait après avoir écrasé la Macédoine de Persée (voir la fin de ce billet).
En Asie, c'est la Chine qui sera vaincue, le Parti Communiste chinois renversé et le territoire chinois également démembré.
En Orient, une fois la priorité russe disparue, l'Amérique pourra engager les énormes forces mobilisées durant le conflit pour régler la question djihadiste. Daech sera écrasé, et l'Arabie Saoudite pourrait ne pas y survivre. En fonction des dégâts perpétrés entretemps par le terrorisme en Occident, les Américains pourraient être tentés de raser la Mecque, comme les Romains rasèrent jadis le Temple de Jérusalem en répression des révoltes juives.
Détail intéressant pour l'islam, l'Amérique semble être ce que fut Rome pour le judaïsme antique : la nation à l'Aigle par laquelle vient le jugement :
"L'Eternel fera partir de loin, des extrémités de la terre, une nation qui fondra sur toi d'un vol d'aigle, une nation dont tu n'entendras point la langue, une nation au visage farouche, et qui n'aura ni respect pour le vieillard ni pitié pour l'enfant. Elle mangera le fruit de tes troupeaux et le fruit de ton sol, jusqu'à ce que tu sois détruit; elle ne te laissera ni blé, ni moût, ni huile, ni portées de ton gros et de ton menu bétail, jusqu'à ce qu'elle t'ait fait périr. Elle t'assiégera dans toutes tes portes, jusqu'à ce que tes murailles tombent, ces hautes et fortes murailles sur lesquelles tu auras placé ta confiance dans toute l'étendue de ton pays; elle t'assiégera dans toutes tes portes, dans tout le pays que l'Eternel, ton Dieu, te donne." Dt 28, 49-52
Les flots de migrants pourraient être contrôlés et placés comme colons sur des terres ravagées par la guerre, comme Pompée fit des pirates, en les installant en Cilicie et dans le Péloponnèse, après avoir éradiqué le danger global qu'ils représentaient en Méditerranée. Certains envisagent d'ailleurs déjà cette option.
Et comme Pompée, à la tête de la plus grande armée romaine jamais formée jusqu'alors, utilisa avant de la démobiliser cette force pour régler quelques questions en suspens, les USA pourraient, pour finir, mener quelques opérations au Venezuela et au Brésil, pour raffermir leur contrôle sur l'Amérique du Sud. Le tout avec la bénédiction du Conseil de Sécurité des Nations Unies où il n'y aurait plus à craindre de veto russe ou chinois.
C'est ainsi que se fera l'avènement de l'Empire, et que lorsque la paix reviendra, naîtra la société de demain, qui sera elle-même éphémère.
Pour les musulmans, un érythréen (pas un américain) prendra le contrôle de la Mecque et détruira la Kaaba.
A part ça mettre fin au régime baathiste et vaincre IS ne sont pas deux objectifs différents. Il n'y aura aucune stabilité en Syrie tant qu'un régime pro-iranien sera au pouvoir.
A part ça un truc aussi débilement revenchar que raser la Mecque ressemble à tout sauf à l’Amérique.